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ADEC, un outil clé pour un diagnostic précoce

Cette semaine, je suis allée à Flinders University (Adelaide), une université aux dimensions australiennes. En sortant du bus, j'ai du traverser un pont, une petite forêt, un hall gigantesque avec un foodtruck (délicieux !) et contourner un lac pour arriver au lieu de rencontre tant attendu avec Professeure Robyn Young.


Robyn Young enseigne la psychologie à Flinders University. Elle a commencé très tôt à s’intéresser à l’autisme et au syndrome Asperger puisqu’elle en a fait son sujet de thèse. Son travail a d’ailleurs été repris par la chaîne australienne ABC pour faire un documentaire, dénommé « Uncommon Genius » (ou le Génie Atypique).


Robyn Young a travaillé sur de nombreux sujets autour de l’autisme. Cet article se concentrera sur l’outil de dépistage des Troubles du Spectre de l’Autisme (TSA) qu’elle a mis en place pour des jeunes enfants. Cet outil est connu sous le nom de ADEC, ou Autism Detection in Early Childhood (Détection de l’autisme dans la petite enfance) et permet de détecter dès le plus jeune âge des comportements pouvant indiquer un trouble du spectre de l'autisme.




Qu’est ce que l’outil ADEC ?


L’outil ADEC identifie clairement les comportements qui pourraient indiquer la présence de Troubles du Spectre de l’Autisme chez des enfants qui ne parlent pas encore (preverbal children). Jusqu’à présent, ces comportements n’étaient pas diagnostiqués chez le jeune enfant, à cause d’un manque de connaissance et de sensibilisation.


Avant de commencer ses recherches sur l'ADEC, Robyn Young a été amenée à voir des enfants de 6 mois qui présentaient des symptômes du spectre de l’autisme. Leur frère ou soeur ayant déjà été diagnostiqués autiste, les parents étaient alors sensibilisés et avaient contacté des psychologues dès l'apparition des premiers doutes.


Effectivement, ces enfants n'avait pas un développement comme celui auquel on pourrait s'attendre pour un enfant du même âge. Pour autant, le diagnostic était très difficile. En effet, à l’époque, en 1994, il fallait répondre à plusieurs critères pour pouvoir caractériser l’autisme :

  • Trouble du langage, or, un enfant de cet âge ne parle pas, la plupart du temps ;

  • Absence de relation d’amitié, encore une fois, à cet âge un enfant n’est confronté qu’à sa famille, les relations d’amitiés se nouent après.

Il fallait donc identifier les caractéristiques qui faisaient qu’un enfant si jeune soit différent d’un enfant « typiquement développé ».


L’équipe a alors étudié un certain nombre d’éléments qui pourraient illustrer les critères de diagnostic d’un enfant de deux ans ou moins.

Ces éléments pouvaient par exemple être l’imitation ou l’absence de réponse au nom. En effet, comme l'a souligné le docteur Catherine Lord, 90% des enfants ayant un Trouble du Spectre de l’Autisme ne répondaient pas à leur nom à l’âge de 12 mois.


Finalement, les chercheurs ont retenu 16 éléments. Selon l’outil ADEC, si l’enfant ne répond pas à ces 16 critères à l’âge de 2 ans, il a un risque de développer des TSA.

Le médecin ou pédiatre peut donc suivre le développement de l'enfant au regard de ces critères et pourra être alerté si l'enfant ne répond pas à la majorité. Et si, sur la base de cet outil, il y a un risque de développer des Troubles du Spectre de l’Autisme alors l’enfant et sa famille seront orientés vers une équipe spécialisée et pluridisciplinaire afin de procéder à un diagnostic complet.


De nombreuses études montrent la pertinence du test tant sur sa sensibilité que sur sa spécificité. En effet, cet outil permet de savoir avec une assurance raisonnable si l’enfant a des chances de développer des Troubles du Spectre de l’Autisme en grandissant. Pertinent, il ne détecte que les TSA et non d’autres troubles tels qu'un handicap intellectuel, un trouble de l'apprentissage ou tout autre trouble du développement. ADEC est vraiment spécifique à l’autisme et c’est ce qui lui confère toute sa valeur.


Cet outil est publié dans le Australian Council of Educational Research (ACER) et des équipes de recherches au Mexique, en Chine, aux Etats-Unis, en Malaisie et en Suède sont également en train étudier son utilisation.




Comment rendre cette méthode plus accessible à la médecine générale ?


Lors d’une des conférences de Robyn Young, un pédiatre lui a confié qu’il aimait beaucoup l’outil ADEC mais qu’il ne l’avait jamais utilisé, car il était trop long et qu’il n’avait pas le temps d’y consacrer 15 à 20 minutes au cours d'une consultation.

Il fallait donc trouver un moyen de rendre cette méthode plus rapide pour qu’elle soit réellement exploitable. Les chercheurs ont alors essayé d’isoler les critères les plus pertinents afin de créer une version plus courte de l’ADEC et on publié le BADEC (ou Brief ADEC) en retenant 5 critères.


En Australie, chaque enfant est examiné à 6 mois, 12 mois et 18 mois et chacun des compte-rendu est inscrit dans un « Blue book » (ou livre bleu).

Ces 5 critères ont été insérés dans ce livre bleu afin de les vérifier à chaque consultation et de sensibiliser les médecins généralistes et pédiatres.

Si un enfant ne remplit pas ces 5 critères, le professionnel pourra alors continuer l'examen à l'aide de la version plus longue de l’ADEC.


La surveillance est donc accrue puisque parents, soignants et médecins sont informés et sensibilisés à ces critères.

Evidemment, cet outil n’a pas pour but de demander à l’entourage de diagnostiquer des troubles du spectre de l’autisme, il a seulement pour objectif de les sensibiliser et leur donner des clés pour comprendre le développement de leur enfant. Si l’enfant ne remplit pas tel critère, alors il est peut être important de consulter une équipe spécialisée pour obtenir un diagnostic formel.



Pourquoi est-ce important de détecter puis de diagnostiquer le plus tôt possible les Troubles du Spectre de l'Autisme ?


« Maintenant qu'existent des interventions auprès des très jeunes enfants présentant des troubles de développement, il importe, plus qu'auparavant, de faire un dépistage qui permette de parvenir plus rapidement à un diagnostic juste et d’amorcer l'intervention appropriée » (Bryana Siegel, 1987)


L’intérêt d’un diagnostic précoce est multiple :


  • Il permet d’éviter l’attente, l’errance entre les différentes institutions et le stress des familles. Les parents recevront un soutien plus rapidement et pourront alors concentrer leur énergie sur les besoins de leur enfant.

  • Ce diagnostic permet également d’éviter la survenue de surhandicap, tels que l’aggravation des troubles ou des complications comportementales.

  • Il donne à l'enfant l’opportunité de recevoir une intervention précoce. C'est un élément clé dans la réussite de l'intervention. En effet, les professionnels travaillant avec des personnes avec TSA ont constaté des différences importantes entre les enfants ayant reçu une intervention professionnelle précoce et ceux n’en ayant pas reçu. De plus, les études neurologiques ont démontré une certaine plasticité du cerveau durant la période de la petite enfance. Ainsi, une intervention précoce permet de favoriser l’apprentissage et d’éviter que se cristallisent des comportements moins bien adaptés.


Dans un prochain article, je développerai les échanges que nous avons eu à propos d'une méthode d'intervention mise en place par Robyn Young, SPECTRA !

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